Daniel Lesueur m'a appris l'amour du travail et la recherche de la perfection. Lui même formé par Daniel Friedrich, il m'a fait partager ses secrets et ceux qu'il à appris de son "maître",
Plonger dans la conception et fabrication d’une guitare classique, a quelque chose d’un parcours initiatique et mystique.
Toute la concentration est requise pour mener à bien le long cheminement qui aboutira, peut-être, à un « Grand » instrument.
Ma conception d’un grand instrument est avant tout d’être fidèle à mes goûts, au-delà des modes. Tout au long de mes recherches, j’ai essayé de trouver des réponses à des problèmes qui n’ont pas pu m’être expliqués par d’autres. Comme dans toute œuvre créative, les questions sont sans fin et c’est ce qui fait tout l’intérêt de ce métier. Chaque jour amène une nouvelle découverte.
L’humilité devant la matière vivante qu’est le bois et devant l’empirisme de l’acoustique lié à ce matériau non linéaire font le luthier.
Je me sens, en quelque sorte, comme un sculpteur de son.

Diapason : 650 mm
Longueur du corps : 487 mm
Épaules : 290 mm
Taille : 245 mm
Hanche : 370 mm
Poids : 1850 à 1935 grs (suivant les bois utilisés)
Rosace : padouk, péroba jaune, érable, ébène, bubinga
Chevalet : palissandre des indes
Fond et éclisses : Dalbergia rétusa (cocobolo)
Filets de bord : vouacapoua americana, peroba jaune ondé, poirier.
Vernis : intérieur (fond et éclisses) : encollage benjoin/gomme sandaraque
Extérieur : fond dur PU, finition cellulosique satiné polis

L’extrême densité du Dalbergia Retusa (cocobolo) 1,35g/cm3
donne, pour les mêmes épaisseurs de travail, un instrument plus lourd qu’avec le palissandre des indes. C’est, à mon avis, acoustiquement parlant le plus proche du célébre Dalbergia Negra interdit par la convention de Washington.

La tête de manche, signature du luthier, est une recherche, d’abord pour savoir ce qui s’est déjà fait, et ensuite pour trouver un dessin personnel qui s’accorde avec l’esthétique générale de la guitare. J’ai choisi de retrouver les placages que j’ai utilisés pour les filets de bord plus un placage de palissandre dos Santos avec des « zébrures » qui m’ont permis d’animer cette surface avec un effet « miroir » qui forme un chevron. Comme pour toute l’esthétique de ma guitare j’ai privilégié les courbes. Les chanfreins sont là pour adoucir la forme générale.

Le manche, acajou du honduas, est renforcé avec une tige en carbone pour éviter toute déformation. La précision de rectitude du manche est primordiale pour le réglage et la facilité de jeu du guitariste. C’est pour cette raison que je travaille ma touche en hélice. Cela permet d’avoir 1mm de plus, en hauteur, au niveau des basses à la 12 ème case, tout en ayant un plan de corde parfaitement plat ce qui est le plus confortable pour les musiciens. A contrario, le choix d’un sillet de chevalet plus haut au niveau des basses, voile le plan des cordes dont le touché devient moins agréable. J’ai choisi de masquer les bord des frettes pour des raisons esthétiques. Le montage du manche est fait à la Française.

Le corps
J’ai passé beaucoup de temps à dessiner les contours, et le résultat est une forme faite uniquement de courbes sans aucune section de droite. Après de nombreux essai j’ai trouvé l’équilibre épaules /taille/hanches que je trouve d’une esthétique idéale.
J’ai choisi le Dalbergia rétusa dit « cocobolo » pour sa beauté et surtout pour sa qualité acoustique qui est comparable au palissandre de Rio. J’aime les guitares un peu lourdes, la masse du bois fournit un son profond et riche, et aide à sa longueur de résonnance.
Je passe un encollage à l’intérieur du corps de la guitare.Celui-ci laisse le bois respirer mais ralentit de manière importante l’échange hydrique entre l’air et le bois. De ce fait la guitare tient l’accord même dans les conditions très changeantes d’une salle de concert.

La table d’harmonie et son barrage, en épicéa, est la partie la plus passionnante des recherches. C’est elle qui va donner toutes les qualités de timbre, de puissance et de personnalité de l’instrument.
Mais le barrage en dehors de ses facultés mécaniques et acoustiques va aussi faire qu’une guitare sera facile et agréable à jouer. J’ai conçu ce barrage, à force de recherches, pour avoir un touché de corde très agréable, « facile », et très dynamique, mais qui ne sature pas facilement. Cela donne une guitare puissante mais qui garde toutes ses qualités expressives et son timbre, quel que soit le jeu du musicien.
Différentes lectures mon appris que la contrainte longitudinale, modérée, de l’épicéa d’une table d’harmonie, donne un meilleur résultat acoustique. C’est pour cela que je fais une table assez « voutée ».

J’ai voulu une rosace qui puisse être différente sur chacune de mes guitares. J’improvise donc cette « mosaïque » de bois précieux dans la feuillure, cela personnalise chaque instrument de manière unique.

Les filets de bords sont composés de 9 placages. Intégré au milieu de filets noir et blanc, le peroba jaune ondée donne une impression dorée dont l’aspect change suivant l’orientation de la lumière.

Le chevalet, pièce maîtresse de la « fabrication » du son. Son collage et la pression exercés lors de cette opération sont très importants et doivent être d’une régularité irréprochable sur toute sa longueur. Pour cela, j’ai conçu une cale thermoformée qui épouse parfaitement le galbe et les barrages lors du collage.
Le double trou de fixation, permet d’avoir un angle de contrainte de compression du sillet par les cordes précisement calculé et parfaitement maîtrisé, cela évite aussi le coup de fouet qui abîme la table en cas de glissement de la corde dans le chevalet.
Le sillet en os est compensé, chaque point d’appuis de la corde est calculé pour une justesse optimale.